Juridique

Dépassement du crédit d’heures de délégation : les règles à connaître pour les élus du CSE

Les heures de délégation constituent un droit essentiel pour les représentants du personnel. Elles permettent aux élus du comité social et économique (CSE) d’exercer leurs missions de représentation pendant leur temps de travail, sans perte de rémunération. Ces heures sont considérées comme du temps de travail effectif et doivent être accordées par l’employeur dans les conditions prévues par la loi ou par le protocole d’accord préélectoral.

Qui peut bénéficier des heures de délégation ?

Un crédit d’heures est attribué aux membres titulaires du CSE afin qu’ils puissent remplir leurs fonctions de représentation du personnel. D’autres représentants peuvent également en bénéficier, comme les délégués syndicaux ou les représentants syndicaux au CSE dans les entreprises d’au moins 500 salariés. Dans les entreprises comportant un CSE central, les représentants syndicaux au CSE central peuvent eux aussi disposer d’heures de délégation, sous certaines conditions.

Combien d’heures sont prévues par la loi ?

Le nombre d’heures de délégation peut être fixé par le protocole d’accord préélectoral (PAP). Cet accord peut adapter le volume individuel ou collectif des heures de délégation, à condition que le total d’heures prévu pour chaque collège reste au moins égal au minimum légal.
À défaut d’accord, la loi fixe un contingent mensuel de :

  • 10 heures dans les entreprises de moins de 50 salariés ;
  • 16 heures dans les entreprises de 50 salariés et plus.

Ce crédit d’heures est mensuel. 

Cependant, la loi permet aux élus du CSE de reporter les heures non utilisées sur les mois suivants, dans certaines limites. Ce report ne peut avoir pour effet de leur permettre de disposer de plus d’une fois et demie leur crédit mensuel. Ainsi, un élu disposant habituellement de 16 heures pourra, après report, en utiliser jusqu’à 24 heures sur un mois. L’élu doit simplement informer l’employeur au moins huit jours avant la date prévue d’utilisation des heures reportées.

Dans quels cas le dépassement du crédit d’heures est-il possible ?

Il peut arriver que le crédit mensuel accordé à un représentant du personnel soit insuffisant pour lui permettre d’exercer l’ensemble de ses missions. Dans ce cas, un dépassement est possible, mais seulement dans des circonstances exceptionnelles. Ces circonstances doivent être à la fois imprévisibles et suffisamment importantes pour justifier une activité accrue du CSE.

La jurisprudence reconnaît, par exemple, le dépassement d’heures en cas de grève prolongée affectant tout ou partie de l’entreprise, de projet de restructuration assorti d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), ou encore de délocalisation entraînant plusieurs licenciements. D’autres situations peuvent être admises, comme une mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent.

Le représentant du personnel qui dépasse son contingent d’heures doit être en mesure de démontrer, d’une part, que le crédit d’heures habituel était entièrement épuisé et, d’autre part, que les heures supplémentaires ont été consacrées exclusivement à l’exercice de son mandat. En dehors de ces situations, tout dépassement est considéré comme injustifié.

L’employeur peut-il vérifier le dépassement ?

Les heures de délégation ordinaires bénéficient d’une présomption de bonne utilisation : c’est à l’employeur de prouver un abus.

En revanche, les heures effectuées au-delà du crédit mensuel ne bénéficient pas de cette présomption.
C’est donc à l’élu d’apporter les preuves nécessaires du caractère exceptionnel de la situation et du lien entre les heures supplémentaires et ses fonctions représentatives. L’employeur est en droit de vérifier ces éléments avant de procéder au paiement des heures concernées.

Le dépassement est-il rémunéré ?

Lorsque le dépassement est justifié, les heures supplémentaires de délégation sont considérées comme du temps de travail effectif et doivent être rémunérées au même titre que les heures normales. Elles peuvent ainsi être payées en heures supplémentaires.
Cependant, l’employeur est autorisé à différer le versement du salaire correspondant le temps de s’assurer du caractère exceptionnel de la situation.

À l’inverse, lorsque le dépassement n’est pas justifié, les heures effectuées au-delà du contingent ne sont pas rémunérées. Si elles ont été payées à tort, l’employeur peut en demander le remboursement, selon le régime des saisies sur rémunération (et non celui des avances sur salaire).

Quelles conséquences en cas de dépassement injustifié ?

Si un élu dépasse son crédit d’heures sans pouvoir démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles, l’employeur peut opérer une retenue sur salaire correspondant aux heures excédentaires.
Dans les cas les plus graves, notamment en cas de dépassements répétés ou d’utilisation abusive du budget de fonctionnement du CSE pour compenser ces heures, l’élu peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire.
Certaines décisions de justice ont même admis que le licenciement d’un salarié protégé puisse être envisagé lorsqu’il est établi que les heures déclarées étaient fictives ou sans lien avec le mandat.

En cas de désaccord, le représentant du personnel peut saisir le juge des référés du conseil de prud’hommes, seul compétent pour apprécier la réalité des circonstances exceptionnelles invoquées.

Article rédigé par Juritravail

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