Planète CSE

Pourquoi se porter candidat aux élections du CSE ?

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Tous les quatre ans en moyenne, les élections professionnelles viennent rythmer la vie des entreprises de plus de 11 salariés. À la clé : le renouvellement des membres du CSE, instance représentative du personnel depuis sa création par les ordonnances Macron en 2017. Pourtant, ces scrutins souffrent parfois d’un déficit de candidatures. En cause : un manque d’informations, la peur de s’exposer ou la difficulté à concilier « engagement » et « vie professionnelle ». Et si, au contraire, devenir élu du CSE était une opportunité à saisir ?

« Être élue CSE donne du sens à ce que je fais, je suis heureuse de ne pas faire que mon travail au quotidien et d’être proche du collectif », confie Alice, élue du comité d’une grande entreprise de cosmétiques. Elle apprécie notamment le fait de pouvoir intervenir en soutien des salariés. « Aujourd’hui, une grande partie de mon travail d’élue consiste à travailler pour mes collègues et à les accompagner ». Ce qui l’a motivée à candidater ? Un différend qu’elle avait eu avec un manager par le passé. « Je n’avais pas eu le réflexe de me tourner vers le CSE mais un collègue membre du comité m’a aidée à ce moment-là. Cela m’a donné une bonne image des élus et forcément, lorsque que, quelques années plus tard, celui-ci m’a proposé de me présenter, j’ai accepté pour pouvoir à mon tour aider des collaborateurs en souffrance. J’étais contente de rendre ce que l’on avait fait pour moi ». Si Alice soutenait naturellement ses collègues auparavant, à l’image de Monsieur Jourdain – « Je les coachais individuellement et les guidais en discutant avec eux du mal-être ou de certains comportements déviants » –, elle le fait dorénavant avec sa casquette d’élue. « J’aide un grand nombre de salariés que je ne connais pas forcément ». En ce sens, nombreux sont les membres de l’instance qui soulignent la satisfaction d’avoir pu résoudre un problème, faire évoluer une situation ou tout simplement aider un employé à faire valoir ses droits. Engagés concrètement et humainement, ils jouent ainsi un rôle utile et reconnu par leurs collègues.

Être acteur de l’entreprise

Autre mission qu’Alice considère particulièrement valorisante, l’importance des élus dans les grandes décisions prises par l’entreprise. Et ce, d’autant plus lorsque l’on fait partie d’une grande organisation. Car dans celles de plus de 50 salariés, le CSE bénéficie de prérogatives renforcées : il est obligatoirement consulté sur la marche générale de l’entreprise, les orientations stratégiques, la situation économique, la politique sociale ou encore la formation professionnelle. « Être membre d’un CSE permet d’être acteur de son entreprise et de pouvoir apporter sa pierre à l’édifice sur certains sujets », assure-t-elle. Devenir élu permet en effet de mieux comprendre le fonctionnement de la société, les logiques managériales, économiques ou sociales qui la traversent et change le regard que l’on porte sur son environnement de travail. « Nous pouvons suivre la stratégie de l’entreprise, de ses organisations et réorganisations et être informés de sa situation économique et financière. Si notre pouvoir n’est que consultatif, nous pouvons néanmoins pousser des sujets et challenger la direction », explique Alice. Ses avis ne sont pas de simples formalités ; ils peuvent influencer des décisions majeures, à condition d’un engagement réel et structuré des élus. Autre rôle crucial, l’amélioration des conditions de travail. Salaires, horaires, environnement, santé, sécurité, égalité professionnelle… Les sujets traités sont nombreux et directement liés au quotidien des équipes.

Des élus porte-paroles

C’est souvent la raison première d’un engagement au CSE : porter la parole des salariés, faire remonter leurs préoccupations et veiller à la défense de leurs intérêts. Alice se réjouit ainsi d’avoir récemment réussi à faire avancer le sujet de la « sustainability » et d’avoir obtenu une prime pour les modes de transport doux utilisés par les collaborateurs de l’entreprise. Ou de manière un peu plus lointaine, dans le cadre des NAO, d’avoir pousser la négociation d’un pacte social et santé comprenant une politique de télétravail, des congés pour les proches aidants, des congés maladie pour les enfants, une revalorisation de la participation à la mutuelle d’entreprise, un compte épargne-temps (CET) ou encore, le rétablissement du lundi de ­ Pentecôte comme jour férié. Alice résume ainsi les différentes responsabilités qui incombent au représentant du personnel : « Il joue un rôle à la fois sur les œuvres sociales, sur la dimension santé, sécurité et conditions de travail dans l’entreprise et sur le suivi de la stratégie de l’entreprise ». Autre rôle-clé, celui d’écouter les collaborateurs et de recueillir leurs doléances. Car pour Romain Fournier, avocat fondateur du cabinet Bleu Samouraï, il est clair que les salariés se tournent plus facilement vers le CSE que la direction. « Les collaborateurs s’adressent plus volontiers aux membres du comité qu’au service RH dans lequel ils ont moins confiance ». En ce sens, le référent harcèlement nommé par l’instance constitue un intermédiaire privilégié pour un salarié victime de harcèlement. Il est là pour « porter un message et alerter l’employeur sur les conditions de travail ». Devenir élu du CSE constitue ainsi un engagement personnel mais surtout ­ collectif.

Garant du dialogue social

Participant pleinement au dialogue social, les membres de l’instance participent en quelque sorte à la bonne marche de l’entreprise. Maître Romain Fournier rappelle qu’un CSE qui fonctionne va de pair avec une entreprise en bonne « santé ». « Un employeur qui travaille étroitement avec son comité est le signe d’un climat social apaisé et qui avance. Quand un CSE dispose de membres élus pleinement investis et qui ont le pouvoir d’avancer, c’est souvent bénéfique pour l’entreprise. À l’inverse, si elle est en guerre avec le comité, c’est un signe d’alerte pour les salariés », prévient-il. Pour lui, l’instance constitue « un lieu privilégié d’échanges ». Alice se réjouit qu’au sein de son entreprise les RH apprécient l’aide des élus du comité. « Nous bénéficions d’un soutien incroyable. Les ressources humaines organisent des réunions pour présenter aux collaborateurs les bienfaits des CSE et le top management explique aux salariés l’importance d’être des élus ».

Un cadre protecteur

Pour Alice, il est important d’avoir des interlocuteurs de qualité au sein du CSE afin d’évoluer dans un cercle vertueux. L’objectif est d’avoir les meilleurs candidats pour garantir un niveau d’échanges de qualité avec la direction. Au sein de mon syndicat, nous faisons particulièrement attention aux profils que nous recrutons et écartons les personnes qui ont des problèmes avec l’entreprise ». Exit donc les salariés qui viendraient chercher une protection. Car en devenant élu, le membre du comité devient un collaborateur protégé. « Si la direction souhaite le licencier, elle doit demander l’autorisation de l’inspection du travail », précise Maître Romain Fournier. Une protection qui vise à garantir la liberté d’expression et d’action syndicale dans l’entreprise. L’avocat met ainsi en garde les employeurs : ces derniers ont intérêt à pousser des salariés « motivés, avertis, ouverts d’esprit et ouverts aux autres avec qui ils s’entendent bien et avec lesquels le dialogue social est fluide. En ce sens, tous les employés ne peuvent pas se présenter », prévient-il. D’où l’importance pour l’employeur de mettre en avant des candidats qui sont bien dans leur poste et qui sont appréciés par la hiérarchie. Selon lui, ce sont avant tout des personnes ayant la fibre syndicale et désireuses de porter la voix des collaborateurs. « Ces dernières font souvent de la politique à l’extérieur ou sont parents délégués, ou encore ont des profils désireux d’aider le collectif », complète Alice. Parmi les autres dispositions légales pour garantir aux élus des CSE un minimum de moyens et de protection : le crédit d’heures dont ils bénéficient pour accomplir leurs missions. Celui-ci varie entre 10 et 20 heures par mois selon la taille de l’entreprise. Ils disposent par ailleurs, dans le cadre de leur mandat, d’un droit d’accès à l’information, aux formations économiques et en santé, sécurité et conditions de travail (SSCT) intégralement financées, et d’une certaine liberté d’expression. Loin des clichés sur des réunions interminables, le mandat d’élu constitue donc un vrai levier de développement personnel. Négociation, prise de parole, rédaction de documents, gestion de projets, écoute active, sens de la diplomatie ou de la synthèse… Les compétences acquises sont précieuses et transposables dans nombre de domaines.

Article rédigé par Charlotte de Saintignon

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