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RESTAURATION COLLECTIVE : Le webinaire du GOEES repense l’avenir post-crise

Réinventer l’univers de la restauration collective en gestion directe au sein de l’entreprise et du tourisme social, repenser l’offre alimentaire pour répondre aux attentes des convives, revoir les pratiques alternatives de service et distribution face à la pérennisation du télétravail (digital, VAE et portage complétant le repas à table)… Autant de problématiques abordées lors du webinaire organisé au printemps par le Groupement des organismes employeurs de l’économie sociale (Goees).
Photo © Caroline Hummels de Pixabay.

Par Aude Aboucaya (voir aussi les Actualités sociopros du n° 114, notre édition de rentrée)

« Notre ambition consiste à donner plus de perspectives positives à la restauration collective autogérée en entreprise et dans le tourisme social dont une part est assurée par les CSE. Sans laisser le champ libre aux marchands de soupe », a précisé Philippe Lapouge, à la fois expert restauration et analyste du soutien commun à l’État-major de l’armée de l’Air au ministère des Armées, gérant du réseau Restau’Co et animateur du webinaire.

Brainstorming de la restauration autogérée

Pour la restauration collective d’entreprise, la crise a été particulièrement violente. Quel sera le paysage de la restauration collective à l’issue de la crise sanitaire ? Jean-Claude Tufféri, président du Goees a évoqué en introduction les changements sociétaux de l’entreprise et a interpelé les invités sur la manière de consolider et réinventer la collective au sein de la restauration d’entreprise autogérée. Une prérogative faisant sens après la crise, selon lui. « L’arrêt total ou partiel des activités des acteurs du secteur ont permis de réviser notre mode de gestion. Il faut repenser les process de travail et l’offre alimentaire. La restauration d’entreprise autogérée doit retrouver sa dynamique via les circuits courts, l’agriculture biologique et décarbonnée, le travail avec les producteurs pour porter les valeurs de l’ESS. Il s’agit de prendre le contrepied de la PAC prônée par le gouvernement qui préconise l’agriculture intensive », a-t-il déclaré en soulignant qu’il n’y aurait pas de coût supplémentaire en œuvrant dans l’intérêt des convives et des producteurs. « Autre enseignement induit par la fermeture de nos établissements durant la crise : le renforcement de la restauration 2.0 afin de favoriser le retour du déjeuner dans l’entreprise, moment privilégié de convivialité », a-t-il noté. Et ce, en faisant cohabiter plusieurs modes de restauration, sans oublier la formation des salariés pour répondre aux attentes du convive et la question du salaire via l’entreprise et le CSE.

Yannick Pelletier (Imestia), Jean-Claude Tufferi (Goees) et Philippe Lapouge (Restau’Co).

Une néorestauration d’entreprise ?

Pour Yannick Pelletier, directeur général d’Imestia-Prestarest (Prestarest est la filiale du groupe adhérente du Goees, NDLR) qui officie dans la restauration d’entreprise et du tourisme social depuis 20 ans, la problématique s’articule autour de la massification des achats et l’obtention de prix en lien avec cette massification. « Parmi les problématiques auxquelles sera confrontée la restauration d’entreprise : la diversité de réouverture conciliant la la vocation sociale prépondérante de cette restauration. Les employés ont pris l’habitude de manger sur le coin de leur bureau, d’aller dehors se restaurer. Et cette vocation sociale a disparu. Il faut rendre la restauration collective plus attractive que par le passé, avec des produits de proximité et la prise en compte de la Loi Egalim, véritable enjeu de qualité ». Il y aura donc selon le directeur général d’Imestia, un avant et un après-crise pour la fréquentation et les habitudes prises pendant la pandémie et le télétravail. La collective essuie une perte d’environ 20 % de son potentiel et fait face à une vraie problématique du recrutement.

Chez BNP, ce sont les recettes en baisse de 80 % qui préoccupent Xavier Baland, directeur des opérations du GIE GAM Restaurant-BNP. La restauration interne du groupe BNP Paribas concerne 50 000 collaborateurs en Île-de-France répartis sur 18 établissements franciliens et 2 en région. « La fréquentation quotidienne couvre environ 4 000 repas. Chez nous, il n’y a pas eu de chômage partiel, mais des recettes en forte baisse. Notre modèle économique très généreux est le suivant : le convive paie le coût des denrées au prix du marché de gros non transformé (1/3 du prix du repas) et le reste est pris en charge par la banque. La crise sanitaire est une formidable opportunité pour questionner la véritable érosion de notre activité challengée par la gamelle, la restauration commerciale et le télétravail. Depuis 15 mois, nous avons développé l’adaptation, la flexibilité au cours d’une année difficile en observant les protocoles sanitaires requis par l’État. En sortie de crise, nos objectifs sont multipliés pour maintenir la survie et l’ouverture de nos établissements », souligne le directeur des opérations.

Si la baisse de fréquentation est inévitable en raison du télétravail, le GIE GAM Restaurant-BNP planche sur de nouveaux modèles et des opportunités à mettre en œuvre selon trois pistes : « la réduction des empreintes immobilières avec moins de restaurants mais plus remplis ; une offre de restauration classique avec des corners (dark kitchen) et l’évolution de l’offre du jour via notre application Welcome at work pour éviter le goulet d’étranglement entre midi et 14 h et pour étaler l’arrivée des convives. Objectif : supprimer la file d’attente et les risques sanitaires ». Xavier Baland avoue également travailler sur des canaux de distribution pour les besoins du click and collect, une éventuelle réponse aux besoins des télétravailleurs pouvant planifier leur repas du lendemain en se servant dans des bocaux à emporter issus de la carte du jour et entreposés dans un frigo connecté relié au convive par une alerte SMS. « Il faut se différencier des sociétés de restauration collective pour assurer la survie de la restauration autogérée grâce à une agriculture de proximité, un respect de la RSE (zéro plastique, zéro gaspi) et une subvention de repas qui ne soit pas conditionnée au déjeuner du convive sur place. Il existe des solutions pour obtenir des accords de subvention afin de mieux nourrir les salariés et éviter un état de santé déplorable ».

Quant aux offices intégrés dans des TPE ne disposant pas de gros moyens, Sébastien Arnold, ex-président du salon Restau’Co qui se tiendra cette année le 8 septembre, préconise « l’usage de frigos connectés afin que les convives puissent bénéficier d’une restauration de qualité d’une part et que d’autre part, les établissements concernés regagnent un peu de chiffre d’affaires pour compenser la perte des cuisines ».

Restauration administrative depuis Bercy

Christophe Marmin, directeur général des services de l’Agraf, était convié en qualité de représentant de la restauration administrative. Il a présenté la situation actuelle du réseau : 30 restaurants en Île-de-France et un droit exclusif pour le ministère de l’Économie, centrale de Bercy (8 000 personnes), 42 000 convives et 2, 2 millions de repas annuels en mars 2020. Après la crise, l’Agraf n’a servi que 500 repas quotidiens (vs 10 000 / jour). « L’offre a été profondément modifiée (service à l’assiette, exit le bar à salade…), avec sur le plateau un hors d’œuvre, un plat chaud et un dessert. Le nombre de hors d’œuvres et de desserts a été divisé par 2. Les usagers sont moins présents mais l’offre est plus qualitative », a-t-il souligné. Les réservations sont désormais obligatoires via notre propre application. Et pour la première fois depuis 12 ans, nos convives sont satisfaits car ils n’ont plus de file d’attente ». Les plateaux sont d’ailleurs distribués par un agent à l’entrée de chaque restaurant. En parallèle, de la vente à emporter a été mise en place avec 3 « Crocs » (sandwich, pizza, pasta box) représentant de 40 à 60 % de vente à emporter (VAE). Sur les plus grands établissements gérés par l’Agraf (4 000 personnes), la VAE a atteint le seuil de 30 à 35 %. Lors de l’inauguration d’un site de 800 couverts d’ici au mois de décembre 2021, 2/3 de snacking seront proposés avec 1/3 de service à table. « Entre 8 h et 15 h, le Wifi sera ouvert et les convives auront la possibilité de manger chaud ou froid, avec une offre à piocher en boulangerie, pizzeria, sandwich, pasta box, sushis (qui nécessitent un gros travail en cours sur l’hygiène). Le tout dans des armoires connectées pour satisfaire le souhait de manger de manière déstructurée », poursuit Christophe Marmin qui planche également sur le bio afin d’honorer les objectifs fixés par la loi Egalim. « Le 1er enjeu pour le bio est budgétaire. Le second enjeu réside dans la capacité de nos prestataires à répondre à l’offre bio pour atteindre les 50 %, notre objectif », conclut-il. Dans les tuyaux également, le click and collect qui pour l’instant ne trouve pas son public. Ayant essuyé un échec commercial contrairement à la VAE, le sujet est encore en germe.

L’Agraf travaille sur ses budgets 2022 avec en ligne de mire l’espoir de toucher plus de 65 % des 10 000 clients journaliers habituels qui sont 3 jours par semaine en télétravail. « Pour proposer une restauration collective performante suite à la crise, la difficulté réside dans la quête de nouveaux convives », entérine Philippe Lapouge.

Nul doute que la restauration autogérée saura trouver les leviers nécessaires. Et comme vu plus haut, certains ne sont pas en reste et ont déjà bien amorcé leur petite révolution…

ENCADRÉ
Un nouveau restaurant HSBC inauguré en pleine crise sanitaire

Le groupe HSBC qui avait son siège historique au 103 avenue des Champs-Élysées s’est installé avenue Kleber, à 500 mètres (© Google Maps).

Voilà un retour d’expérience étonnant sur la création d’un restaurant innovant. Le témoignage de Christophe Patte, responsable de la restauration chez HSBC est éloquent.

« On a ouvert en mars 2020 un nouvel établissement au sein du tout aussi nouveau siège de HSBC. Certes, il y eut beaucoup de questionnement de l’employeur lorsque nous exploitions la piste du sous-traitant pour l’offre alimentaire de ce restaurant. Nous avons alors mené une bataille en interne consistant à prendre la défense de la restauration autogérée plus intéressante selon nous. Ce fut compliqué mais le défi a été relevé. Près des Champs-Élysées, 1 300 repas /jour sont servis. Il a fallu repenser la restauration autogérée des salariés en plein plan social. Nos prestations à la clientèle prennent désormais la forme d’une offre de brasserie multichoix, multiplats. Nous avons réduit l’offre (14 plats par le passé vs 3 aujourd’hui) tout en la rendant super qualitative (produits frais, locaux, bio, pas de surgelés, service à l’assiette, dressage brasserie). Nos pâtisseries sont faites maison et nous avons maintenu la VAE. Nous enregistrons 30 % de fréquentation, soit 350 personnes au total (200 couverts servis, 150 VAE et 50 sur place). Avec la réouverture des terrasses, la fréquentation connaît une hausse. Et nous proposons aussi le repas du lendemain pour le télétravail. L’entreprise qui dispose par ailleurs d’une tour en restauration concédée, elle, enregistre de mauvais retours… »



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