
Aussi peu souhaitables soient-ils, les conflits s’immiscent régulièrement au cœur des entreprises et de leurs effectifs. Les CSE ont un rôle de premier plan à jouer dans leur résolution, voire leur prévention.
Si la vie dans la sphère privée n’est pas un long fleuve tranquille, celle dans une entreprise ne l’est pas davantage. Au travail comme ailleurs, les conflits ne sont pas rares. C’est là, peut-être, qu’ils sont d’ailleurs le plus susceptibles d’advenir. Rien de moins simple en effet que de faire coexister paisiblement des personnalités diverses aux aspirations personnelles et aux méthodes de travail variées.
Une simple incompatibilité d’humeurs peut faire basculer l’ambiance générale au bureau. Divergences de points de vue comme d’intérêts, sentiments d’inégalités de traitement, les motifs de dissension prospèrent dans le monde professionnel. Les conditions de travail sont elles aussi susceptibles de devenir une sources de conflits ?
Ces désaccords peuvent prendre plusieurs formes. Ils se révèlent être tout aussi bien collectifs qu’individuels. Ces discordes opposent selon les cas, les salariés et la direction, les employés et les managers. Les situations conflictuelles peuvent également naître entre collègues, tout simplement. Depuis 1993, la DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) mène l’enquête sur les relations professionnelles et les négociations d’entreprise. Elle interroge à intervalles réguliers « les acteurs des relations sociales dans les établissements, afin de comprendre la dynamique des relations professionnelles et du dialogue social existant entre les directions des entreprises, les représentants du personnel et les salariés ».
Cette enquête atteste que plus de la moitié des entreprises françaises de plus de 10 salariés rencontrent des conflits individuels. Dans une autre étude concernant les risques psychosociaux, la même Dares dévoile que 30 % des employés sondés ont déjà subi au moins un comportement hostile dans le cadre de leur travail.
De fâcheuses conséquences
Ces conflits impactent évidemment ceux qu’ils concernent directement mais également l’entreprise dans son ensemble. Il convient de ne pas négliger les conséquences plus que fâcheuses de cette réalité du monde du travail. Au-delà des risques psychosociaux qu’ils font courir, les conflits ont une influence sur l’efficacité individuelle comme collective, sur la productivité même de l’entreprise. Les établissements où ces conflits se rencontrent se retrouvent soumis à davantage d’incidents, d’accidents du travail répétés, d’arrêts maladie, de problèmes de qualité de production comme de démissions fréquentes. Les conflits coûtent cher !
D’après ses recherches, l’OPP, un cabinet de conseil européen spécialisé dans la psychologie du travail, estime qu’un employé passe près de 1,8 heure par semaine à régler des situations conflictuelles au travail. Selon l’Observatoire du coût des conflits (Opinion Way – All Leaders Initiative), les salariés français perdraient un mois de travail par an en conflits professionnels. L’équivalent en coût salarial se monterait à 2,9 Mds € par an.
Les raisons ne manquent donc pas pour s’attaquer au problème. Et de par leur nature même, les CSE se retrouvent sur le front. Les élus de l’instance figurent de fait parmi les mieux placés pour aider les salariés. Leur connaissance de l’entreprise, de ses effectifs, du droit du travail comme des recours possibles les désignent comme des interlocuteurs privilégiés.
Par ailleurs, les comités ont pour mission de prévenir les risques et travailler à l’amélioration des conditions professionnelles. Cela les amène à s’intéresser à l’activité de travail réel et aux relations entre collaborateurs. L’élu porte toute son attention sur le climat social des équipes. Il peut aussi, dans des cas graves ou urgents, endosser le rôle de lanceur d’alerte. Les élus disposent d’un droit de signalement notamment en cas d’atteinte aux droits des personnes. Dès qu’un membre de l’instance constate dans l’entreprise le non-respect des droits des personnes, de leur santé physique ou mentale ou bien encore de leurs libertés individuelles, il doit saisir l’employeur. Les deux peuvent alors mener une enquête conjointement en écoutant séparément les salariés impliqués avant de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation.
Réagir vite
D’autres acteurs peuvent bien entendu entrer en scène en cas de différends entre employés. Les délégués syndicaux, les supérieurs hiérarchiques ou bien encore les RH ont évidemment un rôle à jouer. Les employeurs, plus encore, puisqu’ils ne peuvent déroger à leur obligation de sécurité et protection de la santé mentale et physique des collaborateurs. À défaut, ces derniers sont d’ailleurs en droit de demander la résiliation judiciaire de leur contrat de travail. L’employeur se doit donc de prendre à bras-le-corps cette problématique mais surtout, comme tous les autres acteurs de la gestion des conflits, il doit se plier à une règle essentielle : réagir le plus rapidement possible, dès les premiers signes de tension. Il n’est rien de pire que de laisser la situation se détériorer. Une écoute attentive et impartiale de tous s’avère indispensable pour une bonne compréhension de la situation. Elle permet de déterminer la nature du problème, s’il est professionnel ou personnel, mais également sa typologie : conflit de relation, de méthode, d’intérêt ou bien encore de valeur. Ce processus permet plus facilement de proposer des compromis aux personnes impliquées. Cette écoute doit néanmoins se poursuivre bien après la mise en place de ces solutions. Les ressentiments et les rancœurs peuvent mettre du temps à s’effacer. Mieux vaut alors poursuivre le dialogue sur le long terme.
Mais aussi parfois, les solutions et compromis proposés peuvent ne pas trouver d’écho favorable auprès des personnes concernées. Il peut alors être utile de faire entrer un nouvel interlocuteur dans la discussion, un médiateur.
Si vis pacem, para bellum*
Extérieur à l’entreprise, le médiateur peut rétablir le lien entre les différents partis et leur donner les moyens de partager une communication apaisée. Là encore, il suit une procédure qui commence toujours par l’écoute des salariés. Vient ensuite le temps de la recherche de résolution du conflit qui est assorti, au minimum, d’une médiation à court terme voire d’un suivi régulier.
Écoute, recherche de compromis, médiation, des solutions existent pour régler les conflits entre collaborateurs. Toutefois, il est certain que la meilleure d’entre elles reste d’éviter que les désaccords ne surviennent. Si vis pacem, para bellum*. La gestion des conflits commence avant tout par la prévention.
L’employeur comme le CSE peuvent notamment organiser des réunions rassemblant tous les salariés afin qu’ils s’expriment sur tout ce qui pourrait être source d’éventuels conflits individuels ou collectifs. La parole a alors toutes les chances de se libérer avant de devenir trop dure. L’entretien annuel d’évaluation figure aussi parmi ces rendez-vous où l’on peut entendre individuellement les collaborateurs et prendre connaissance, à la source, des feux qui couvent.
Les élus du CSE, grâce à leur proximité avec les salariés, ont toutes les cartes en main pour maintenir le dialogue au quotidien et apaiser les tensions. Et le jeu en vaut la chandelle car, en évitant les conflits, on s’épargne bien des maux mais on peut aussi redonner de l’élan au collectif. S’ils sont résolus, les conflits deviennent une opportunité de dialogue et de dépassement du groupe.
* Si tu veux la paix, prépare la guerre !
Article rédigé par Sébastien Dieulle
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