Ancien professionnel de l’édition, Jérémy Fraise dirige aujourd’hui Mot-Tech, un acteur incontournable de la rédaction de procès-verbaux à destination des instances représentatives du personnel. Entre rigueur, confidentialité et adaptation aux mutations du dialogue social, il revient sur sa carrière, sa vision du métier et les enjeux d’un secteur de niche. Alors que les nouvelles technologies et l’IA suscitent de nouvelles interrogations, Jérémy Fraise réaffirme l’importance de l’expertise humaine et d’un strict respect du RGPD, notamment via des dispositifs sécurisés garantissant la confidentialité des échanges. Le tout dans un souci du management de la qualité qui fait de Mot-Tech un acteur très convoité sur le segment des PV…

Pour commencer, pouvez-vous retracer brièvement votre parcours professionnel jusqu’à votre prise de fonction chez Mot-Tech ?

En provenance du monde de l’édition indépendante et de la presse BD, j’ai rejoint Mot-Tech, qui n’était alors qu’une équipe très réduite, en tant que rédacteur des débats, en 2008. Après deux années à couvrir des réunions diverses pour les IRP (instances représentatives du personnel, NDLR), la gestion du planning m’a été confiée. Elle a rapidement été enrichie de missions de contrôle qualité dans le cadre d’une démarche visant à rationaliser les processus de l’entreprise et obtenir la certification ISO 9001*. Après ces deux années, j’ai endossé le rôle de chef de projets et obtenu une certification de RMQ**. Enfin, en 2014, j’ai pris mes fonctions de directeur exécutif et membre du Codir.

Qu’est-ce qui vous a conduit à vous intéresser au secteur des comités sociaux et économiques et, plus précisément, à celui de la rédaction de procès-verbaux ?

Diverses expériences dans les métiers de la rédaction et de l’édition m’ont conduit à découvrir, un peu par hasard, ce métier et ce marché de niche. J’ai toujours souhaité combiner mes qualités rédactionnelles avec mes capacités en matière de gestion de comptes et de conduite de projets. Je suis un entrepreneur dans l’âme.

Quelle est la mission principale de Mot-Tech aujourd’hui, et en quoi se distingue-t-elle de celle des autres acteurs du secteur ?

Mot-Tech facilite le dialogue social en rédigeant des comptes-rendus, des procès-verbaux sur mesure pour ses clients qui sont essentiellement des RP, à commencer par les CSE. Cette approche spécialisée BtoB distingue Mot-Tech de ses concurrents qui sont plus enclins à couvrir tout type de manifestation orale ; y compris dans le secteur public et le milieu associatif. Pour autant, Mot-Tech délivre une prestation à certains organismes de cet acabit. De plus, l’équipe de rédacteurs, très majoritairement composée de CDI, est présente sur la totalité du territoire métropolitain. Enfin, notre démarche qualité, validée par la certification ISO 9001 de nos processus depuis 2012, est un gage inégalé de qualité, de rigueur professionnelle et de respect absolu de la confidentialité.

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Comment fonctionne concrètement votre activité de rédaction de PV ? Et dans quels cas vos rédacteurs se rendent-ils physiquement aux réunions ou travaillent-ils à partir d’enregistrements audio ?

Mot-Tech s’adapte à toutes les configurations et tous les budgets. Nous nous déplaçons sur site ou bien assistons aux réunions en visioconférence. Bien évidemment, nous travaillons également sur la base d’enregistrements audio. Nous produisons un projet de PV qui est adressé à notre ou nos donneurs d’ordres dans un délai convenu, et organisons des navettes en cas de compléments à apporter aux documents livrés.

Quelle plus-value êtes-vous en mesure d’apporter à nos lecteurs ? Quelle typologie de CSE fait appel aux services de Mot-Tech ?

Des CSE de toute taille et de tout secteur font appel aux services de Mot-Tech. Les secrétaires de CSE, pour ne parler que d’eux, ont besoin de se concentrer sur leurs missions premières. Or, la rédaction du PV de réunion se révèle démesurément chronophage. En outre, un PV se doit d’être neutre et objectif. Il sera plus facilement approuvé par les acteurs concernés dès lors que la rédaction aura été confiée à un prestataire extérieur et impartial.

Quelles sont, selon vous, les principales évolutions du marché des PV de réunions CSE et assimilées, ces dernières années ?

Les évolutions sont multiples. La crise sanitaire a installé la visioconférence, réduit les déplacements et démontré aux clients que la qualité pouvait être au rendez-vous ; y compris dans le cas d’un travail à distance, sur la base d’un enregistrement audio des réunions.

La réforme des CE devenus CSE, amorcée le 1er janvier 2018 et devant prendre fin le 31 décembre 2019, a notamment, mais pas seulement, supprimé les CHSCT de Jean Auroux, les transformant en simple commission (CSSCT) émanant du CSE. Cette réforme a généré un nouveau calendrier dans la mesure où, quatre ans plus tard, la quasi-totalité des CSE ont dû procéder à de nouvelles élections ; ce qui a nécessité une veille active sur notre portefeuille.

L’on peut également signaler l’émergence de l’IA, qui demeure très largement imparfaite dès lors qu’il s’agit de traiter un matériau, en l’occurrence des enregistrements audio, sans reconnaissance vocale fiable. Qui plus est, le recours à l’IA ne permet pas de respecter le RGPD. Quels secrétaires, élus ou DRH souhaitent que leurs débats soient stockés chez Open AI ?

Le respect du RGPD est-il un enjeu fort pour votre activité ? Comment assurez-vous la confidentialité des enregistrements et des comptes-rendus ?

Sans dévoiler de secrets industriels qui sont l’une des clefs de notre certification ISO 9001, nous pouvons dire que nous avons bâti un espace client Internet entièrement sécurisé, accessible grâce à un login et à un mot de passe via une adresse web spéciale. Cette dernière permet à nos clients d’accéder aux PV et enregistrements audio, uniquement si tel est leur souhait. Les documents sont placés sur un serveur sécurisé, confidentiel, conformément aux normes internationales de sécurité, dans un data centrer français. En complément des différentes caractéristiques de sécurité de notre serveur et de notre hébergeur, nous avons décidé d’allouer un budget annuel à un prestataire de sécurité informatique qui conduit des audits et mène des tentatives d’intrusion sur nos ordinateurs dans le cadre d’une sensibilisation à l’hameçonnage.

En coulisse avec Jérémy Fraise

Parmi ces trois citations autour de l’écriture, laquelle vous inspire le plus et pourquoi ? « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. » – Nicolas Boileau « Écrire, c’est une façon de parler sans être interrompu. » – Jules Renard « Ce qui me tue, dans l’écriture, c’est qu’elle est trop courte. Quand la phrase s’achève, que de choses sont restées au-dehors ! » – J.-M.G. Le Clézio
Je retiendrai la citation de Boileau qui sied mieux à notre métier. Un bon rédacteur tient plus de la plume chirurgicale de Raymond Clevie Carver (poète et écrivain américain, NDLR) que de celle, bavarde et avide de digressions, de Marcel Proust !

Quel moment ou quelle rencontre a le plus marqué votre trajectoire professionnelle ?
J’ai eu la chance de rencontrer des personnes de grand talent dans le monde de l’édition. En tant que rédacteur, j’ai également été impressionné par l’implication de plusieurs secrétaires de CSE capables de porter une parole et une contradiction en maîtrisant des sujets à la fois complexes et variés. Ils méritent un respect qui, selon moi, n’est pas à la hauteur de leur engagement. Des DRH brillants m’ont aussi fait forte impression et inspiré dans ma façon de gérer un collectif. Ma rencontre avec les fondateurs de Mot-Tech a évidemment changé ma vie, me permettant de découvrir une entreprise de fond en comble jusqu’à piloter son activité aujourd’hui. Enfin, j’aurai une pensée pour la formatrice en droit social Madame Nathalie Attia et Monsieur Jean Auroux qui ont forgé ma connaissance du secteur.

Quand vous déconnectez totalement du monde des PV, quel est votre remède antistress ou votre activité de prédilection ?
Le tennis et la lecture, mais l’un après l’autre.

Quelles sont vos priorités actuelles en tant que directeur exécutif de Mot-Tech ?

Notre priorité est et demeure la satisfaction conjointe de nos clients et de nos salariés. Nous développons, adaptons sans cesse nos outils et processus dans le cadre d’une démarche d’amélioration continue de la qualité de nos prestations. Notre ambition est de conserver notre image de prestataire de référence sur ce marché, et de développer notre activité. Le recrutement et la formation de nos salariés sont indissociablement liés à ces objectifs.

Selon vous, l’IA challenge-t-elle les compétences d’un bon rédacteur de PV de réunions ?

Comme évoqué précédemment, l’IA stagne et ne saurait remplacer un rédacteur humain chevronné. Nous avons d’ailleurs rassuré nos clients et salariés sur ce point, car nous avons mené des tests poussés qui nous permettent de l’affirmer. Il convient néanmoins de rester vigilant et ne pas adopter une posture dogmatique. L’IA peut devenir, avec le temps, une aide à la rédaction, mais elle ne saurait faire l’économie d’une supervision par l’humain.

Enfin, comment voyez-vous l’évolution du métier de rédacteur de PV et le rôle de Mot-Tech dans les années à venir ?

Mot-Tech va continuer à croître et à gagner la confiance de nombreux CSE et autres instances. Les débats en réunion ont besoin de reformulation et de synthèse pour être présentés au collectif. Un PV se doit d’être lisible, de présenter les enjeux d’une problématique, de traduire la ou les positions des représentants des salariés. Le métier conserve son rôle essentiel et a encore de beaux jours devant lui.

*certification ISO 9001 : norme pour la mise en place d’un système de management de la qualité.

**certification RMQ : concerne la certification du responsable du management de la qualité.

Interview par Aude Aboucaya