Cours à distance, chômage, pouvoir d’achat en berne, difficultés pour trouver un stage ou un contrat de travail, isolement social… la liste des obstacles auxquels sont confrontés les jeunes est longue. Même si la situation de la jeunesse était loin d’être rose avant la crise sanitaire, cette dernière accentue les difficultés. Quels outils sont mis en place pour remédier à cette pauvreté ? Tour d’horizon.
Par Valérie Pontif.
Certains auteurs n’hésitent pas à parler de « génération Covid ». Force est d’observer que les indicateurs sont loin d’être au beau fixe. Avant la crise sanitaire, environ 1,5 million de jeunes âgés entre 15 et 29 ans étaient sans emploi, ni en études, ni en formation en France (au 1er janvier 2019). Ce phénomène s’est beaucoup amplifié. Au second semestre 2020, on comptait entre 200 000 et 250 000 jeunes chômeurs supplémentaires, avec un taux de chômage avoisinant les 22 % pour les jeunes, même si les écarts varient suivant les méthodes de calcul utilisées. Les causes de ce bond sans précédent du chômage sont multiples : fins de CDD, perspectives d’embauches repoussées ou revues à la baisse, notamment dans les secteurs d’activité qui embauchent traditionnellement des jeunes (restauration, loisirs, activités sportives…), difficultés à trouver un contrat d’apprentissage… Au vu des statistiques, les jeunes les moins qualifiés sont encore davantage touchés par la pauvreté, ce qui revient à penser que le diplôme reste encore protecteur contre le risque de pauvreté, même s’il convient de relativiser. Autre élément notable, les écarts se creusent entre les jeunes pouvant compter sur un appui financier de leur famille, bénéficiant de bonnes conditions pour continuer à étudier et ceux qui voient leurs revenus largement revus à la baisse faute d’avoir trouvé un emploi pour payer leur loyer et les frais occasionnés par leur scolarité. D’ores et déjà, plusieurs mesures ont été déployées pour venir en aide à la jeunesse et des pistes se dessinent.
« 1 jeune, 1 solution »
Lancé à l’été 2020, le plan « 1 jeune, 1 solution » articule des aides à l’embauche, des formations, un accompagnement et des aides financières pour les jeunes rencontrant des difficultés. En pratique, des compensations de charges sociales et aides exceptionnelles ont été accordées aux employeurs pour recruter des jeunes en alternance. Des missions d’utilité sociale ont également été lancées pour permettre aux jeunes d’acquérir des compétences au sein d’associations, de collectivités territoriales. Un des objectifs de ce plan se situe dans le domaine de la formation, afin d’orienter les jeunes vers des emplois d’avenir, à travers des formations qualifiantes, en orientant les jeunes vers les métiers du numérique, le secteur du soin… L’objectif est de former 200 000 jeunes vers ces métiers et secteurs d’activité d’avenir. Des parcours sont également mis en place pour les jeunes ayant décroché du système scolaire, l’accent étant mis sur la personnalisation des parcours. En 2021, la garantie jeunes est doublée. Ce sont donc 100 000 jeunes qui devraient être suivis.
Par ailleurs, des aides exceptionnelles ont été décidées pour venir en aides aux jeunes : aide de 200 € versée par les CROUS pour 800 000 jeunes précaires ou modestes de moins de 25 ans, versée en juin 2020 pour les étudiants ayant perdu leur travail ou leur stage, ainsi qu’aux étudiants ultramarins éloignés de leur famille et en grande difficulté financière. Cette aide a été également versée par la CAF aux jeunes de moins de 25 ans bénéficiant d’une APL et n’ayant pas d’enfant à charge. Par ailleurs, une aide d’un montant de 150 € a été versée en novembre par les CAF à environ 600 000 jeunes de moins de 25 ans non bénéficiaires d’APL et par les CROUS à plus de 700 000 étudiants boursiers.
Des mesures pour les apprentis
Concernant les apprentis ne trouvant pas d’employeurs compte tenu du contexte, une instruction de la DGEFP du 12 février 2021 mobilise les services de l’Etat pour aider les jeunes apprentis ayant commencé une formation en centre de formations d’apprentis (CFA) sans avoir d’employeur à en trouver un. La situation est en effet délicate. En pratique, un apprenti peut être accueilli pendant 6 mois en CFA, mais, si à l’issue de ce délai, il n’a pas trouvé d’employeur, il ne pourra plus être pris en charge à hauteur de 500 € par mois par les organismes agréés chargés de la formation professionnelle. Au niveau régional, une organisation devrait se mettre en place pour aider à la conclusion de contrats d’apprentissage en lien avec les acteurs locaux, le service public de l’emploi… Ceux qui n’auront pas trouvé d’employeur pourraient se voir proposer la poursuite de leur formation dans la voie scolaire, quand cela est possible.
Vers un « revenu jeunes »
Certaines voix s’élèvent pour réclamer un « revenu jeunes ». Pour prendre un exemple, la Présidente de la région Ile-de-France a lancé un « revenu jeunes actifs » de 500 à 670 Euros par mois, conditionné à une formation gratuite pour les 18-25 ans sans emploi. Au-delà de cet exemple, cela fait des années que la question d’un revenu pour les jeunes de moins de 25 ans refait surface de temps à autre. Le RSA est en effet ouvert aux personnes âgées d’au moins 25 ans résidant en France de manière stable et effective. Pour les jeunes ayant entre 18 et 25 ans, il est possible de percevoir le RSA jeune actif, à condition d’avoir exercé une activité professionnelle pendant au moins 2 ans à temps plein (au moins 3214 heures) au cours des 3 années précédant la date de la demande[1]. Ces conditions sont très restrictives, d’autant plus que les jeunes travailleurs exercent souvent une activité à temps partiel pour pouvoir continuer leurs études et alternent fréquemment périodes de chômage et contrats courts.
Si elle n’est pas prise au sérieux, la pauvreté des jeunes produira de lourdes conséquences, tant sur les parcours professionnels, que sur la vie personnelle et la santé des jeunes. Reste à espérer que la crise sanitaire sera l’occasion de construire une politique de fond et non un saupoudrage de mesurettes en faveur de la jeunesse.
[1] Régime distinct pour les parents isolés.