
Le télétravail, défini par l’article L. 1222-9 du Code du travail, est devenu un pilier des nouvelles organisations professionnelles. Parmi les questions récurrentes que soulève ce dispositif figurent celles-ci : l’employeur peut-il exiger du salarié qu’il revienne dans les locaux de l’entreprise ? Et à quels frais et indemnités le télétravailleur peut-il prétendre ?
Le télétravailleur peut alterner des périodes de travail dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, à son domicile ou dans un autre local.
Mise en place du télétravail & retour au bureau
En principe, le télétravail est mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe (C. trav. art. L. 1222-9). L’accord collectif ou la charte doit préciser notamment les conditions de passage en télétravail et les modalités de retour à une exécution du contrat de travail sans home office. C’est donc dans ce cadre que l’employeur peut prévoir les conditions dans lesquelles le salarié doit revenir dans les locaux de l’entreprise, de manière ponctuelle ou définitive. En l’absence d’accord collectif ou de charte, le télétravail peut être mis en place par une entente entre le salarié et l’employeur, qui peut être formalisée « par tout moyen » : e-mail, courrier, avenant au contrat de travail (C. trav. art. L. 1222-9). Lorsque les parties sont convenues d’une exécution de tout ou partie du travail par le salarié à son domicile, l’employeur ne peut pas modifier cette organisation contractuelle sans l’accord du collaborateur (Cass. soc. 13-4-2005, n° 02-47.621), même en présence d’une clause de mobilité (Cass. soc. 31-5-2006 n° 04-43.592). Dans un tel cas, l’employeur ne peut donc pas exiger du salarié qu’il regagne les locaux de l’entreprise… Cette hypothèse survient souvent lorsque le télétravail a été négocié dès l’embauche et qu’il est donc prévu comme une modalité d’exécution spécifique de la prestation de travail.
Frais et indemnités dus au télétravailleur
L’obligation pour l’employeur de prendre en charge les coûts découlant du télétravail n’est pas prévue par le Code du travail. Pour la jurisprudence, les frais qu’un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent lui être remboursés sans pouvoir être imputés sur sa rémunération. La Cour de cassation n’a cependant pas statué sur le cas précis des frais engagés par le télétravailleur. Pour la Cour d’appel de Versailles, la prise en charge des frais exposés dans ce cadre est obligatoire pour l’employeur (Versailles 21-3-2024, RG n° 22/01810). À l’inverse, celle de Paris (CA Paris, 3-4-2024, RG n° 21/07292) a jugé que les articles L. 1222-9 et suivants du Code du travail ne prévoient pas l’obligation, pour l’employeur, de prendre en charge les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail (matériel, logiciels, abonnements, etc.). Dans cette affaire, le télétravail n’était cependant pas obligatoire pour le salarié concerné. La Cour de cassation pourrait donc adopter la solution de la Cour d’appel de Versailles en présence d’un employé contraint de télétravailler. Pour l’administration, un collaborateur qui télétravaille peut bénéficier d’une indemnité dans la limite de 10,70 € par mois, pour une journée de télétravail par semaine, sans justificatif (BOSS). Si la Cour de cassation n’a pas statué sur la prise en charge des frais de télétravail, elle s’est déjà prononcée sur l’indemnité d’occupation due au salarié en home office (celle-ci étant distincte du remboursement des frais). Ainsi, le salarié, contraint d’occuper son domicile à des fins professionnelles en raison de l’absence de mise à disposition d’un local par l’employeur, peut prétendre à une indemnité dont le montant dépend du degré de sujétion subi, lequel relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (Cass. soc. 8-11-2017, n° 16-18.499 ; CA Paris 3-7-2024, n° 21/08992). Il en va de même en cas de télétravail sur demande du médecin du travail, même si un local est à la disposition du salarié (CA Paris 21-12-2023, n° 20/05912). En dehors de ces deux hypothèses, aucune compensation financière n’est due au salarié s’il demande à travailler à domicile alors qu’un local professionnel est effectivement mis à sa disposition (Cass. soc. 4-12-2013, n° 12-19.667). S’agissant du montant de cette dernière, aucun critère d’évaluation n’est défini par les textes et la jurisprudence. Il peut tenir compte de la contrainte que représente, pour le collaborateur, le stockage du matériel professionnel (Cass. soc. 8-11-2017, n° 16-18.499). L’indemnisation peut aussi être fixée en considérant une éventuelle perte de jouissance d’une partie du domicile. Dans tous les cas, l’indemnité d’occupation du domicile privé est soumise à cotisations et contributions sociales. Elle doit donc figurer sur le bulletin de paie.
Article rédigé par Maître Xavier Berjot, Sancy Avocats
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